Résumé
Résumé en français :
L’activité liturgique et commémorative dont l’abbatiale de Saint-Denis est le cadre a des effets sur sa configuration spatiale bien après l’achèvement de sa construction en 1281. L’adjonction de chapelles latérales au flanc nord de la nef, en 1320-1324, ou les créations et transferts d’autels recensés à la fin du Moyen Âge mettent en évidence le phénomène de pression liturgique qui s’exerce sur l’édifice en marge de ses fonctions principales, c’est-à-dire le culte de saint Denis et l’entretien de la mémoire royale. L’étude des chapellenies et services anniversaires fondés à ses autels entre 1108 et le début du XVIe siècle éclaire le réseau mémoriel qui se forme autour de l’abbaye au cours de cette période, mais aussi l’évolution de la politique des moines vis-à-vis des laïcs. À partir du deuxième quart du XIVe siècle, l’abbé et le chapitre cherchent à canaliser le flux dévotionnel des fondations, y compris royales, tandis que les prêtres de la collégiale Saint-Paul voisine et des paroisses de l’exemption dionysienne sont progressivement associés à leur desserte, formant avec les moines une même communauté. La lecture de la répartition des tâches au sein de l’abbatiale et de ses dépendances, qui vise à reconstituer une géographie de la mémoire à Saint-Denis, révèle l’existence d’espaces réservés et un contrôle strict de la destination des autels, notamment de ceux du chevet. Ainsi, la plupart des officiers claustraux de l’abbaye sont associés spécifiquement à l’un des autels à reliques des chapelles rayonnantes depuis, semble-t-il, l’abbatiat de Suger. Cette exclusivité d’usage ne semble pas repérable dans d’autres établissements comparables, apportant un nouvel exemple de l’unicité dionysienne.
Résumé en anglais :
The commemorative and liturgical functions of Saint-Denis influenced the abbey’s spatial configuration for centuries after construction of the core of the church ended in 1281. The addition of lateral chapels on the north side of the nave in 1320-1324, like the creation and movement of altars during the next two hundred years, resulted from the expansion of the abbey’s liturgical engagement beyond its primary responsibilities for the cult of Saint Denis and the commemoration of the kings of France. This study of the chaplaincies and anniversary services established between 1108 and the early sixteenth century casts light on the memory network that develops around the abbey during this period, but also the evolution of the abbey’s policies toward the laymen. From the second quarter of the 14th century onwards, the abbots and chapter try to control the foundations flow (including royal ones). Furthermore, the priests of the collegiate church of Saint-Paul located near the abbey as well as parishes enjoying Dyonisian immunity were gradually associated with services at the abbey’s chapels and thereby incorporated into the Dyonisian community. Focused on the services performed within the abbey church and the establishments immediately dependent on it, this study aims to reconstitute a geography of memory at Saint-Denis. It reveals that the services performed at the different altars were strictly controlled, particularly in the restricted area of the chevet. Therefore, apparently from the time of Abbot Suger, each claustral official of the abbey was generally associated with a specific altar in the radiating chapels. This exclusivity thus distinguished Saint-Denis from other similar establishments, providing yet another example of the uniqueness of the royal abbey.