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Appel à contribution - Cahiers de Mariemont, vol. 6

Des ruines au jardin
Ruines du Château d’Alexandre de Lorraine intégrées dans le parc de Mariemont, 1898 (© KIK-IRPA)
Call for contributors
15th October 2023

Depuis toujours, dans les jardins, l’homme a cherché à faire coexister la nature, dans ses formes les plus subtiles, avec les artefacts les plus raffinés1 . Parmi ces derniers, les traces monumentales du passé, la matérialité de leur vétusté et de leur destruction, le fragile équilibre qu’elles représentent entre mémoire et oubli ont toujours suscité intérêt et fascination2 . Dès qu’il est perçu comme un témoignage du passé dont il convient de conserver et valoriser la trace, l’édifice écroulé, lacunaire, qui ne peut plus remplir sa destination initiale, peut endosser d’autres fonctions, symboliques ou ornementales, au sein du jardin. Ainsi, à Mariemont,  le richissime industriel et philanthrope Raoul Warocqué fait-il intégrer, en 1893, des vestiges du palais de Charles de Lorraine (1712-1780) au parc paysager de style anglais qui entoure sa résidence, combinant à la fois mise en scène romantique de la ruine et valorisation d’une réalité archéologique3 . Aujourd’hui ont cours d’autres pratiques. Au jardin archéologique de Grand en Lorraine ou à celui de Saint-Acheul (Amiens, Somme) par exemple, l’art du jardin est mis au service de la lisibilité et de la médiation du fait archéologique, monumental ou non. Les ruines n’y sont plus de simples ornements parmi d’autres. Ces « jardins archéologiques » sont conçus comme des sites arborés, naturels, dans lequel les ruines sont le sujet.
La revue des Cahiers de Mariemont fait donc appel aux historien.nes, historien.nes de l’art, archéologues, architectes, urbanistes, botanistes, jardinier.ère.s et autres spécialistes de l’aménagement des jardins pour mettre au jour les caractéristiques communes et les grandes évolutions de la pratique de l’intégration des ruines dans les jardins européens au cours des siècles. Il s’agira également d’identifier les enjeux et les stratégies actuels de gestion et de valorisation de cette pratique. Les articles, dépassant l’étude de cas, privilégieront une démarche d’analyse et de mise en perspective diachronique, thématique (types de faits archéologiques, de publics, d’environnements, de climats…) ou territoriale.
Voici une liste non exhaustive de pistes de réflexion à explorer :

  • L’appropriation des ruines, réelles ou factices, transparaît très tôt dans l’art du jardin. Après l’essor de la fabrique au dernier quart du XVIIIe siècle, quelle a été la place des ruines dans les tendances et les styles d’aménagement du XIXe siècle à nos jours ? Peut-on dessiner des évolutions à l’échelle régionale ou européenne ?
  • Pour les propriétaire(s) ou le(s) commanditaire(s) qui ont intégré des ruines dans des jardins, quels ont
    été les enjeux de cette intégration ? Que souhaitaient-ils faire voir et faire comprendre grâce aux ruines ? Aujourd’hui, un concept de « jardin archéologique » semble s’être développé en France. Que recouvre-t-il ?
  • Quel a été le rôle de l’aristocratie, de la bourgeoisie et d’autres acteur.ice.s public.que.s ou privé.e.s dans la préservation (ou non) de ruines historiques dans leurs jardins ? Quel a été l’impact de la législation, des politiques publiques, puis des processus de classements dans cette préservation ?
  • Les ruines sont un objet de fascination atemporel. Encore aujourd’hui de nombreux artistes s’en inspirent. Quelle est leur réinterprétation de ce type de paysage ? Quelle marge de manœuvre l’artiste s’autorise-t-il par rapport à la réalité dans ses représentations ? Quels sont les apports de l’étude de la représentation artistique des ruines à l’archéologie ?
  • Le jardin se transforme au fil du temps et ces transformations nécessitent des adaptations. Comment les ruines y ont-elles été entretenues, restaurées ou réutilisées (pour de nouveaux usages) au cours du temps ? Quelle a été l’évolution des méthodes et des techniques de protection et de valorisation, de médiation ?
  • Comment a été pensé l’aménagement jardinier autour des ruines, quels ont été les codes et les types de
    végétaux ou d’artefacts en usage ? Existe-t-il une « bonne » manière de faire cohabiter végétation et vestiges archéologiques dans les jardins ? Quelle est l’influence du changement climatique et de la conscience écologique croissante sur la conception de ces jardins ? Comment ces pratiques ont-elles évolué au cours du temps ? Que dit cette évolution de la perception de la ruine et du jardin ?
  • Dans le cadre de restaurations, quelles ont été les approches de reconstitution, recomposition ou restitution des ruines dans les jardins ? Et selon quelles ressources : documentaires (archives, iconographies…), archéologiques (sondages, fouilles…), artistiques (littérature, peinture…) ?
  • Quel est le rôle des paysagistes ou des jardiniers dans l’intégration des ruines dans les jardins ? Quelle part de créativité leur est laissée dans un lieu contraint par les exigences de l’archéologie ?
  • Il conviendrait également d’aborder la question du financement de la préservation des ruines dans les
    jardins. Par exemple, quel a été le rôle des acteur.ice.s privé.e.s dans la mise en valeur paysagère de
    vestiges archéologiques au cours des XIXe et XXe siècles ?
  • L’intégration et la valorisation de ruines dans les jardins peut participer à la promotion touristique
    locale ayant un rôle au-delà des frontières du jardin lui-même. Mise en scène, valorisée voire expliquée, la ruine nous rattache au passé, ancre le présent dans l’histoire locale4

Les propositions de contributions, en français ou en anglais (comprenant un résumé de 2 000 à 3 000 signesespaces compris, avec un titre provisoire, une courte bibliographie sur le sujet, et une biographie de 2 ou 3 lignes) sont à envoyer à l’éditeur des Cahiers de Mariemont, Jean-Sébastien Balzat (jean-sebastien [dot] balzatatmusee-mariemont [dot] be (jean-sebastien[dot]balzat[at]musee-mariemont[dot]be)) avant le 15 octobre 2023. Le texte de l’article ainsi qu’un résumé (français et anglais) et 10 mots clés (français et anglais) sont attendus pour le 15 mars 2024.

Les Cahiers de Mariemont
Fondés en 1970, les Cahiers de Mariemont sont publiés annuellement par le Musée
royal de Mariemont (Belgique). À comité de lecture, la revue vise à promouvoir l’étude de ses riches collections et à publier, principalement en français et en anglais, des travaux de recherche dans les grands
domaines de spécialisation de l’établissement : l’art et l’archéologie des mondes méditerranéens anciens, les arts extraeuropéens, l’archéologie et l’histoire régionale, les livres précieux, les arts décoratifs et la muséologie. Ses dossiers thématiques abordent des sujets de l’actualité de la recherche dans une perspective transversale et interdisciplinaire. Les numéros 1-41 sont disponibles sur le portail Persée. (https://www.persee.fr).
Derniers volumes parus :
44 (2023) : Le multiple en art
Réflexions sur cette pratique artistique qui va au-delà du support livre (photographie, xérographie ; body art ou art numérique)
43 (2022) : Réplique et Patrimoine
Tour d’horizon des conceptions et pratiques muséales en matière de réplique d’œuvres patrimoniales
42 (2021) : Raoul Warocqué dévoilé
Histoire des collections du fondateur du musée de Mariemont
41 (2020) : Alexandrie
Publication des résultats des opérations archéologiques au site de Smouha (Égypte)

Volume à paraître :
45 (2024) : Bibliothèques de musées
  • 1M. Mosser et G. Teyssot, L’architecture du jardin et l’architecture dans le jardin, Histoire des jardins de la Renaissance à nos jours , Paris, 1991, p. 8.
  • 2A. Schnapp, Une histoire universelle des ruines. Des origines aux Lumières , Paris, 2020.
  • 3M. Dosogne et M. Demelenne, « Restaurer Mariemont. De Charles de Lorraine à Raoul Warocqué », Cahiers de Mariemont , 43, 2022, p. 11-45.
  • 4Martine Bouchier, « Le Moment politique des ruines », Frontières , vol. 28, n°1, 2016.