Spécialiste reconnu de l’architecture de la Renaissance, en France mais aussi plus largement en Europe, Jean Guillaume a joué un rôle majeur dans l’évolution de l’histoire de l’architecture moderne, sur laquelle il a inlassablement travaillé pendant plus de six décennies. Né à Bressuire, dans les Deux-Sèvres, en 1932, agrégé d’histoire en 1955, il a commencé sa carrière universitaire à la faculté des lettres de Poitiers, où il fut assistant puis maître-assistant de 1960 à 1970, avant d’être nommé à l’université de Tours, où il a rejoint le Centre d’études supérieures de la Renaissance (CESR). Les enquêtes qu’il conduisit alors dans sa région natale lui permirent de soutenir en 1981, sous la direction d’André Chastel, une thèse intitulée L’architecture de la première Renaissance en Poitou : Bonnivet, Oiron, l’art nouveau de 1510 à 1540. En complément de l’étude de deux monuments majeurs, il s’y est attaché à préciser les processus de diffusion de l’art « à l’antique ». Il fut ensuite élu, en 1990, professeur à Paris-Sorbonne, où il enseigna jusqu’à son départ à la retraite en 2000.
Ses analyses très fines, servies par une riche culture visuelle, ont profondément transformé notre compréhension de l’histoire de l’architecture à la Renaissance. La distinction entre les « effets » affectionnés dans un lieu et les « formes », qui peuvent être remplacées au gré des modes en étant alors adaptées pour obtenir les « effets » souhaités, a ainsi permis de nouvelles lectures très stimulantes. Sa volonté d’inscrire ses travaux dans une perspective européenne l’amena à fonder en 1973 les colloques du CESR, qui virent se réunir à Tours des chercheurs venus de l’ensemble de l’Europe et ont permis de fructueuses comparaisons. Les actes de ces rencontres annuelles, publiés sous sa direction dans la collection De Architectura fondée aux éditions Picard, ont en outre promu une histoire de l’architecture « totale » qui, loin de se restreindre à l’étude traditionnelle des styles, s’est étendue à tous les aspects de l’art de bâtir et d’habiter.
Très impliqué dans sa discipline, Jean Guillaume a entre autres été secrétaire général du Comité français d’histoire de l’art (de 1980 à 1995), directeur de la Revue de l’art (de 1991 à 1993), membre du Conseil scientifique du Centro internazionale di studi di architettura Andrea Palladio (Vicence) et administrateur de la Société française d’archéologie. Animé par un constant enthousiasme, il n’a jamais délaissé ses recherches et achevait la dernière relecture du manuscrit d’un livre consacré au Louvre de Pierre Lescot.
Le Centre André-Chastel rend hommage à ce grand historien de l’art, dont les leçons continueront à inspirer des générations de chercheurs.
Texte rédigé par Étienne Faisant